Je suis tombée amoureuse de la musique d’Antônio Carlos Jobim à l’adolescence. Comme beaucoup, je connaissais déjà la célèbre mélodie de «La fille d’Ipanema» mais je n’étais pas familière avec le reste de son oeuvre. Puis, j’ai décroché un boulot de pianiste au Stash Café, un restaurant polonais du Vieux-Montréal et pour garnir mon répertoire, ma mère m’a offert un cahier des partitions du répertoire complet de Jobim. C’est donc durant les soirs de fins de semaines, entre deux assiettes de pierogis sur la rue St-Paul, assise au vieux piano du restaurant, que j’ai eu le bonheur de découvrir la richesse et la beauté des chansons du plus grand compositeur brésilien que le XXe siècle nous ait donné.
Complètement fascinée par la perfection des mélodies et de l’ingéniosité des accords du père fondateur de la bossa nova, je me suis procuré toutes les versions possibles de ses oeuvres, interprétées tant par Jobim que par les plus grands de ce monde, comme Frank Sinatra, Joao Gilberto, Astrud Gilberto, Elis Regina, Eliane Elias, Stan Getz et des dizaines d’autres encore.
Jamais je ne me suis lassée de les entendre chanter l’amour, la joie, la nostalgie, la « saudade », la tristesse, la fête, la nature, Rio, les petits et grands aléas de la vie… Et bien que j’aie souvent inséré certains de ses bijoux musicaux dans mes spectacles ou mes albums, j’ai toujours chéri le rêve d’enregistrer un album complet de la musique de Jobim.
Ce rêve est devenu réalité l’année dernière, alors que le guitariste belge Nicolas Fizsman se trouvait au studio de mon ami, le réalisateur Nick Petrowski. Ce dernier m’a appelé pour me dire qu’il fallait absolument que je vienne enregistrer quelque chose avec le génie musical qu’est Nicolas Fizsman, et que le répertoire de Jobim serait de toute beauté entre ses doigts.
Trois jours plus tard, c’était chose faite. Le jeu de guitare de Nicolas était trop beau, trop touchant, trop parlant pour que nous imaginions même un instant ajouter un « band », des cordes ou quoi que ce soit d’autre sur sa musique. Mais fidèle à mon instrument, j’ai tout de même parsemé ces airs bossa nova de quelques notes de piano ici et là. Le projet a été piloté par Nick Petrowski, dont le mixage reflète une ambiance digne des premiers temps où la bossa nova a fait vibrer la planète entière, au début des années 1960.
J’ai chanté ces pièces avec tout mon coeur, avec toute mon âme et dans le plus grand respect de la culture musicale brésilienne et de la poésie de Jobim, celle-la même qui me berce depuis des décennies. J’espère que l’amour que j’ai mis dans ce projet se reflètera dans l’écoute que vous en ferez, et que la musique de Jobim saura vous transporter dans un univers où le chaos de notre monde disparaît pour un instant.
Vous trouverez aussi dans l’album une seule pièce qui n’est pas de Jobim, mais plutôt de Jorge Ben, « Take it Easy My Brother Charles ». C’est un petit cadeau que je me suis fait, et je suis bien certaine que Jobim aurait approuvé!